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Irrecevabilité de la candidature d’une entreprise en situation de redressement judiciaire, sans plan de redressement ni habilitation à exercer ses activités durant la durée d’exécution du marché public (Tribunal administratif de Bordeaux, 28 mars 2025, n°2501623)

Par une ordonnance en date du 28 mars 2025, le juge du référé précontractuel du tribunal administratif de Bordeaux effectue un rappel des règles de procédure de passation d’un marché public, et notamment de l’exclusion de la procédure d’une offre déposée par un candidat en période de redressement judiciaire, en application de l’article L.2141-3 du code de la commande publique.

Dans cette affaire, la commune de Lège-Cap Ferret avait lancé une consultation en procédure adaptée ayant pour objet l’assistance pour l’exploitation du marché municipal du Cap-Ferret (entretien et encaissement des droits de place) pour une période du 2 avril 2025 jusqu’au 4 janvier 2026.

Par un courrier en date du 10 mars 2025, la commune informe les candidats non retenus du rejet de leurs offres et de l’attribution du marché à la société Lombard et Guérin Gestion. Par un mémoire déposé le 12 mars 2025, la société les Fils de Madame A, classée en seconde position à l’issue du jugement des offres, saisi alors le juge des référés en demande d’annulation de la procédure du marché en cause et du réexamen de sa candidature et de son offre.

À l’occasion de ce recours, il est notamment soutenu par la société requérante que la société attributaire est placée en période de redressement judiciaire, qu’elle ne bénéficie pas d’un plan de redressement judiciaire et que la période durant laquelle cette dernière a été autorisée à poursuivre son activité doit expirer le 14 juillet 2025 et ne couvre pas la durée prévisible d’exécution du marché qui doit courir a minima jusqu’au 4 janvier 2026.

Après un rappel des faits sur la procédure collective en cours, le juge des référés fait une application stricte de l’article L.2141-3 du code de la commande publique, en considérant notamment qu’un plan de redressement en cours d’élaboration ainsi qu’une hypothétique prolongation de six mois d’une période d’observation n’est pas de nature à satisfaire les conditions de l’article précité :

D’une part, il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du 17 juillet 2024, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de cette dernière et a fixé à six mois la durée de la période d’observation. Cette période d’observation initiale a été renouvelée pour une durée complémentaire de six mois par un jugement du 14 janvier 2025 du tribunal des activités économiques de Nanterre, soit jusqu’au 17 juillet 2025. Par ailleurs, il ressort notamment du courrier du 25 mars 2025 de Me Martinat, administrateur judiciaire de la société Lombard et Guérin Gestion qu’un plan de plan de redressement est en cours d’élaboration.

D’autre part, il ressort des pièces du dossier que le délai d’exécution des prestations du marché en cause, pour la période initiale, court du 2 avril 2025 jusqu’au 4 janvier 2026. Ainsi, la société Lombard et Guérin Gestion, admise à la procédure de redressement judiciaire instituée par l’article L. 631-1 du code de commerce, ne bénéficiait pas, le 27 janvier 2025, à la date de remise des offres, ni au demeurant à la date de la présente ordonnance, d’un plan de redressement et ne justifiait pas davantage avoir été habilitée à poursuivre ses activités pendant la durée prévisible d’exécution du marché ayant pour objet l’assistance pour l’exploitation du marché municipal du Cap-Ferret (entretien et encaissement des droits de place) pour les années 2025 et 2026. Par suite, la société Les fils de Madame A est fondée à soutenir que la commune de Lège Cap-Ferret a manqué à ses obligations de mise en concurrence en déclarant recevable la candidature de la société Lombard et Guérin Gestion.

En suivant, le juge des référés est également venu considérer que le choix d’une offre présentée par un candidat irrégulièrement retenu est dès lors susceptible d’avoir lésé, quel qu’ait été son propre rang de classement à l’issue du jugement des offres, l’entreprise requérante. En ce sens, cette dernière est fondée à demander l’annulation de la procédure.

Le juge des référés a ainsi annulé la procédure de passation à compter du stade de l’analyse des candidatures.

Vigilance et rigueur sont donc de mise pour les collectivités au stade de l’analyse des candidatures, notamment dans la vérification de la situation juridique des entreprises candidates.