Application du droit de se taire aux sanctions prononcées contre les militaires (CC, 30 avr. 2025, M. Christophe J., n° 2025-1137 QPC)
Le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article L. 4137-1 du code de la défense en ce qu'elles ne prévoient pas que le militaire à l'encontre duquel une procédure de sanction est engagée, doit être informé du droit de se taire.
Saisi par un renvoi du Conseil d’État, le Conseil constitutionnel était interrogé sur la conformité des dispositions de l’article L. 4137-1 du code de la défense aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment en application de l’article 9 de la Déclaration de 1789. Cette question prioritaire de constitutionnalité s’inscrit dans un contexte plus général de reconnaissance du droit de se taire dans le contentieux de la fonction publique (voir en ce sens : CC, 4 oct. 2024, n° 2024-1105 QPC).
En l’occurrence, l’article du code de la défense contesté prévoit que le militaire inquiété par une sanction disciplinaire ou professionnelle a le droit d’être informé et de bénéficier de la communication de son dossier individuel, de préparer et de présenter sa défense.
Les Sages, sur la base de l’article 9 de la Déclaration de 1789 qui fonde le droit de se taire, jugent que ni la disposition contestée, ni le code de la défense ne prévoient que l’agent est informé de son droit alors que l’autorité peut fonder sa décision sur les déclarations de l’agent. Ainsi pour les juges :
10. Dès lors, en ne prévoyant pas que le militaire à l’encontre duquel une procédure de sanction est engagée doit être informé du droit qu’il a de se taire, les dispositions contestées méconnaissent les exigences de l’article 9 de la Déclaration de 1789. Par conséquent, elles doivent être déclarées contraires à la Constitution.
Il sera noté que s’agissant des effets utiles de cette décision, il a été jugé que l’abrogation immédiate des dispositions déclarées inconstitutionnelles entrainerait des conséquences manifestement excessives en ce qu’elle priverait le militaire poursuivi de la possibilité de présenter sa défense sur les faits qui lui sont reprochés. Cependant, jusqu’à la modification du texte, tout militaire « à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire » et cette décision peut être « invoquée dans les instances introduites à la date de publication de la présente décision et non jugées définitivement.« .