La démission d’office d’un conseiller municipal ayant été condamné à une peine complémentaire d’inégibilité assortie de l’exécution provisoire est-elle contraire à la Constitution ? (non mais sous réserve)
Décision n°2025-1129 QPC du 28 mars 2025
Par un jugement du 25 juin 2024 du tribunal correctionnel de Mamoudzou, un conseiller municipal élu en juin 2020 a été reconnu coupable de plusieurs délits. Il a été condamné à une peine principale mais également à une peine complémentaire d’inéligibilité assortie d’exécution provisoire. L’élu a fait appel de ce jugement et a en parallèle contesté devant la juridiction administrative l’arrêté du 27 juin 2024 du Préfet de Mayotte le déclarant démissionnaire d’office de son mandat. C’est à l’occasion de ce recours qu’il a déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui a été transmise par le Conseil d’État en date du 27 décembre 2024.
Le Conseil constitutionnel a eu à se prononcer sur la constitutionnalité des dispositions 1° L. 230 et L. 236 du code électoral « en tant qu’elles s’appliquent à des élus ayant fait l’objet d’une condamnation pénale déclarée exécutoire par provision sur le fondement de l’article 471 du code de procédure pénale, alors que cette sanction n’est pas définitive ».
Pour déterminer si les dispositions législatives en cause étaient contraires à la Constitution et en substance étaient contraires au droit d’éligibilité d’un élu municipal, le Conseil Constitutionnel a opéré un contrôle de la proportionnalité au regard dudit droit et de l’atteinte résultant de la peine complémentaire avec exécution provisoire.
Le raisonnement des sages s’est axé sur deux aspects :
- L’identification de l’objectif poursuivi par le législateur, soit l’exécution des décisions de justice et le renforcement de l’exigence de probité et d’exemplarité des élus. Ces deux points contribuent à la sauvegarde de l’ordre public (objectif à valeur constitutionnelle).
- L’existence de garanties légales suffisantes encadrant la démission d’office. Le juge prend ici en compte le fait que le Préfet soit en compétence liée et qu’il est possible à l’élu en cause de contester devant le juge administratif l’arrêté de démission d’office. Une telle contestation peut suspendre l’exécution de la décision du Préfet (article L. 236 du code électoral).
Au regard de ces éléments, le Conseil Constitutionnel a jugé que les dispositions en cause sont conformes à la Constitution sous réserve que le juge pénal opère lui aussi un contrôle de la proportionnalité. En effet, une mise en balance doit être faite entre le droit d’éligibilité et l’atteinte qu’engendre le prononcé d’une exécution provisoire sur le mandat en cours d’un élu municipal et à la préservation de la liberté de l’électeur.