Cour des Comptes, 3 mai 2024, n° S-2024-0723, Département de la Haute-Saône
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Dans cette affaire sur fond de protocole transactionnel et de rupture de contrat entre le prĂ©sident du dĂ©partement et son ancienne directrice de cabinet, la Cour illustre et prĂ©cise sa jurisprudence en matière d’avantage injustifiĂ© (article L. 131-12 du CJF). Son raisonnement est ponctuĂ© par le rappel des quatre conditions de l’infraction : « la mĂ©connaissance [des] obligations (…), le caractère injustifiĂ© de cet avantage Ă autrui, l’existence d’un prĂ©judice pour l’organisme ou la collectivitĂ© concernĂ©e, et l’existence d’un intĂ©rĂŞt personnel direct ou indirect pour la personne qui a octroyĂ© l’avantage. »
1° : la condition de méconnaissance d’obligations légales est ici réunie à double titre. D’une part, en raison de l’absence de contestation (née ou à naitre) ainsi que de concessions réciproques et équilibrées entre les parties au protocole. D’autre part, à défaut pour le président du département d’avoir soumis préalablement ce protocole à l’assemblée délibérante. Relevons que ce n’est pas faute d’avoir été averti par la préfète.
2° : concernant le caractère injustifié de l’avantage octroyé, la Cour considère qu’aucun élément ne justifiait que l’ancienne directrice de cabinet reçoive une indemnité supérieure de presque 60.000 euros au montant légal de l’indemnité de licenciement.
3° : le préjudice pour le département est démontré, et ce, « quel que soit son montant » (en l’espèce 57.062,93 euros). La Cour poursuit en considérant que la « minoration éventuelle de celui-ci aurait été dépourvue d’effet sur l’élément matériel constitutif de l’infraction ». Appréciation stricte donc.
4° : enfin, s’agissant de l’existence d’un intérêt personnel direct ou indirect, l’ancienneté des relations entre le président et l’ancienne directrice de cabinet (15 ans), le fait qu’ils soient respectivement président et vice-président d’une association créée quelques semaines avant la fin des fonctions de la directrice et la volonté de préserver la réputation de cette dernière en évitant un licenciement sont, selon la Cour, constitutif d’un intérêt personnel indirect.
En conclusion, l’ancien président du département est condamné à une amende de 9.000 euros.