ActualitésResponsabilité des gestionnaires publics

Cour des Comptes, 3 mai 2024, n° S-2024-0715, Département de l’Eure

Nothing else matt’Eure 🎸

Très attendue, cette décision relative à la faute grave causant un préjudice financier significatif apporte plusieurs enseignements sur les critères d’appréciation de l’infraction.

En cause ? Un ordonnateur et un comptable victimes d’une fraude, certes, mais gravement nĂ©gligents selon la Cour pour qui, rien d’autre n’a d’importance que le manquement aux obligations budgĂ©taires et comptables des gestionnaires.

Le communiqué de la Cour illustre en synthèse les principes de la réforme en retenant que, c’est « par une succession de négligences et de défauts de vigilance, [que l’ordonnateur et le comptable public ont] méconnu les règles de contrôle de la dépense qui leur incombaient, chacun dans le cadre des responsabilités spécifiquement associées à leurs fonctions et à leur périmètre de délégation ».

Pour la Cour, le fait ne pas avoir respecté son devoir de vérification de l’identité du créancier est une faute grave pour l’ordonnateur, « le contrôle de la création d’un nouveau créancier dans le système d’information est déterminant pour la préservation des intérêts de la collectivité ». S’agissant du comptable, la formule de la Cour est limpide : « l’ensemble des défaillances dans le contrôle des pièces justificatives, dont il devait s’assurer de la conformité et de la pertinence spécifiquement et de manière exhaustive au vu du plan de contrôle hiérarchisé de la défense, constitue en soi une faute grave. ». Et ce, d’autant que ces défaillances ont eu lieu dans un contexte de mise en garde par les services fiscaux sur des fraudes aux faux ordres de virement.

S’agissant du préjudice de 791.023,88 euros pour le département (soit 0,12 % du budget d’un montant de 677 millions d’euros), la Cour le considère comme significatif. Notons que les surcoûts (dont les intérêts moratoires faisant passer le préjudice à plus de 1 million d’euros) sont exclus du quantum du préjudice.

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, atténués par les circonstances, les gestionnaires ont été condamnés, chacun à 2.500 euros d’amende.